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B
BACONNET Marcel
Né le 14 juillet 1900 à Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme), fils d’Alfred Baconnet, tapissier et de Marie Perrière, sans profession, Marcel Baconnet participe à la Résistance et reçoit la croix de guerre 39-45
Après la Seconde Guerre mondiale, il exerce la profession de négociant à Montauban. Il devient, à partir de 1947, une des principales figures du gaullisme en Tarn-et-Garonne, département réfractaire aux idées du général de Gaulle. Il exerce des responsabilités dans les divers mouvements gaullistes qui se succèdent à partir de 1947 : président du conseil départemental du RPF (1948), délégué départemental du RPF (1949-1951 puis 1954), président des républicains sociaux de Tarn-et-Garonne. Candidat aux cantonales de 1951 à Montauban, puis aux législatives de 1958 comme suppléant de Pierre de Sainte-Marie (UNR) – élu député -, il obtient plus de succès aux élections municipales et siège au conseil municipal de Montauban de 1953 à 1965, occupant la fonction d’adjoint au maire de1959-1965.
Marié à Jeanne Fournier le 8 avril 1931 à Annecy, il décède à Montauban (Tarn-et-Garonne) le 15 février 1972.
B. Lachaise
D
DUSSEAULX Roger, Armand
Roger Dusseaulx naît le18 juillet 1913 à Paris (12e). Avec le sénateur Geoffroy de Montalembert, il fut la principale personnalité gaulliste de la Seine-Maritime.
Ingénieur agricole sorti de l’École de Grignon en 1932, il exerce les fonctions d’assureur et de conseiller juridique à partir de 1940. Résistant, il est membre du comité directeur de l’OCM et secrétaire de la commission de l’agriculture du CNR. À la Libération, il est secrétaire du comité de direction du Parisien Libéré. Son action lui vaut la Médaille de la Résistance.
Il commence sa carrière politique à Paris en étant élu conseiller municipal sur la liste d’Union des mouvements de la Résistance conduite par Léo Hamon. Très vite, il se tourne vers la Seine-Inférieure et est élu puis réélu député MRP en octobre 1945, juin puis novembre 1946.
Son attachement à de Gaulle le pousse à rejoindre, dès l’automne 1946, le groupe des démocrates-chrétiens qui, avec Louis Terrenoire et Henri Lespès, milite en faveur du maintien des liens entre le MRP et le Général. En janvier 1947, il refuse de suivre ses collègues MRP qui votent l’investiture du gouvernement Ramadier. Il est présent à Bruneval le 30 mars 1947 pour écouter le général de Gaulle.
En octobre 1947, il signe avec vingt autres députés républicains populaires une pétition rédigée par Michelet et Terrenoire en vue de réclamer une révision de la constitution, comme le demande de Gaulle. Cette démarche lui vaut un blâme de la commission de discipline du MPR le 31 octobre. Lorsqu’en novembre le MRP décide d’adhérer à la Troisième Force, c’est la rupture. Roger Dusseaulx quitte le groupe MRP de l’Assemblée.
Il rejoint les Républicains Populaire Indépendants, mouvement qui autorise la double appartenance au RPF. A partir du début de l’année 1948, Roger Dusseaulx rejoint le RPF et en devient un des principaux leaders en Seine-Inférieure.
En juin 1951, tête de liste RPF dans son département, il est proclamé élu au soir du scrutin. La liste gaulliste a obtenu 17,4% des voix. Mais son élection est annulée par l’Assemblée nationale le 26 juillet 1951 à la suite du changement du mode de calcul de la répartition des voix. Le mode finalement choisi est en complète violation de la loi du 9 mai 1951 et de la circulaire adressée aux Préfets par le Président du Conseil le 7 juin 1951. Par opportunisme, l’Assemblée choisit d’invalider Roger Dusseaulx et de déclarer les listes apparentées vainqueurs. Ce calcul permet au candidat MRP Jean Lecanuet de faire son entrée au Palais Bourbon.
De 1952 à 1958, Roger Dusseaulx est conseiller de l’Union Française et y préside la Commission des affaires économiques.
De 1958 à 1962, il est député UNR de la première circonscription de Rouen (cantons de Rouen-2, 4 et 5, et de Darnétal). Il est également 10e adjoint au maire de Rouen de 1959 à 1965 et conseiller général du canton de Rouen-4 de 1961 à 1967. Il entre en novembre 1959 au Comité central de l’UNR et exerce, de mars 1961 à avril 1962, la fonction de secrétaire général du mouvement gaulliste. Nommé, en avril 1962, ministre délégué auprès du premier ministre pour les relations avec le Parlement, c’est son suppléant François Codet (voir notice) qui le remplace au Palais-Bourbon. En mai de la même année, il devient ministre des travaux publics, des transports et du tourisme. Il est réélu député UNR de Rouen en novembre 1962 et préside le groupe UNR-UDT du Palais-Bourbon jusqu’en 1963. Il garde ses fonctions dans l’appareil de l’UNR, au Comité central et à la Commission politique. En 1964, il entre dans la CODER de Haute-Normandie où il préside la Commission des finances. Ayant abandonné ses fonctions d’adjoint au maire de Rouen en 1965, il est réélu député de Rouen en 1967 puis en 1968. Entre deux, il a perdu son mandat cantonal en octobre 1967. Le 6 juin 1970, il préside le Conseil régional de Haute-Normandie. Sa carrière politique s’achève avec sa défaite aux législatives de 1973.
Il meurt le 28 juin 1988 à Rosay-sur-l’Eure (Eure).
D. Bellamy
L
LAFAY Auguste Paul Laurent dit Bernard
Né le 8 septembre 1903 à Malakoff (Seine), décédé le 13 février 1977 à Paris (XVIe arrondissement), conseiller général RPF, sénateur RPF (Seine).
Bernard Lafay est le fils d’Auguste-Jules-Joseph Lafay et de Zoé-Isabelle Chambon. Son grand-père, le général Jules Lafay, sorti des rangs de l’infanterie de marine où il s’était engagé comme simple soldat, fut, à sa retraite, élu maire de Toulon. Son père, ancien élève de l’École polytechnique et docteur ès sciences, fut professeur à l’Ecole polytechnique où il enseigna la physique de 1905 à 1935. Ses parents étaient domiciliés à Malakoff puis à Paris, rue de la Convention.
Bernard Lafay, boursier, fréquente les lycées Michelet et Buffon à Paris, puis obtient son doctorat en médecine en 1931. La même année, il épouse la fille d’un industriel, Paulette Manonviller. Il s’installe comme médecin dans le XVIe arrondissement de Paris, tout en poursuivant des recherches médicales à l’Institut Pasteur, dans le service du professeur Peyron, où il travaille sur la pathologie expérimentale et comparée. Il est en 1937 lauréat de l’Académie de médecine pour ses travaux sur le cancer et en 1938 lauréat de l’Académie des sciences
Son activité politique commence dès les années 30 : aux législatives de 1932, il est candidat radical-socialiste dans la troisième circonscription du XVe arrondissement ; aux municipales de 1935, il se présente dans le quartier Javel (XVe arrondissement) sous l’étiquette de la « concentration républicaine » ; aux élections législatives de 1936, candidat « concentration républicaine » dans la troisième circonscription du XVe arrondissement, il est battu au second tour par le candidat communiste, Michels. Selon diverses notes établies par les renseignements généraux, il aurait été membre du Parti Populaire Français en 1938, mais « son activité dans ce parti n’a pas dû être marquante car il n’a jamais attiré l’attention à cette époque ».
La participation à la guerre va être déterminante dans l’action politique du Dr Lafay. Mobilisé en 1939, versé à sa demande au 72e régiment d’artillerie, tombé aux mains de l’ennemi le 5 juin 1940, évadé le 12, il est cité trois fois et est fait chevalier de la Légion d’honneur. Dans son livre J’étais médecin avec les chars, le docteur André Soubiran rapporte que, le 29 juin 1940, le lieutenant Lafay a été décoré au cours d’une prise d’armes à Bergerac par le général Weygand qui lui dit : « Vous êtes un héros ».
Après l’armistice, il retourne à ses malades et est appelé à siéger au Conseil de l’ordre des Médecins de la Seine, où il remplit les fonctions de secrétaire général. Membre de « Ceux de la Résistance », il appartient au Comité Médical de la Résistance du Dr Milliez et, comme secrétaire général de l’ordre des Médecins de la Seine, il invite ses confrères à respecter le secret médical, en dépit des ordres de l’occupant. En mars 1944, une note allemande émanant de Carl-Heinrich von Stülpnagel, Militärbefehlshaber in Frankreich, oblige les médecins qui traitent des blessures causées par des armes à feu ou des explosifs à les déclarer sans aucun délai à la Feldkommandatur ou à la Kreiskommandatur la plus proche, en indiquant le nom et le lieu du séjour du blessé. Dans une note diffusée par ses soins, le Conseil de l’ordre des médecins note que « l’ordonnance allemande est contraire non seulement aux traditions du corps médical français mais encore au sentiment public de notre pays car c’est en s’appuyant sur ces traditions et ce sentiment que notre jurisprudence a pu, malgré les protestations d’un certain nombre de juristes, donner un caractère aussi strict au secret médical ». L’auteur de cette note est Bernard Lafay, qui doit aussitôt gagner le maquis. C’est pourquoi le général de Gaulle considère qu’il « restera l’exemple du médecin français dans la Résistance ». Le 19 août 1944, il est l’un des premiers à pénétrer dans l’Hôtel de Ville et il assure les soins aux blessés pendant les combats de la Libération de Paris.
C’est à la Libération que commence réellement sa carrière politique. Le Comité Parisien de la Libération le désigne pour siéger à l’Assemblée municipale provisoire comme représentant du XVIe arrondissement, sous l’étiquette de « Ceux de la Résistance ». Membre du parti radical-socaliste, il est élu sous cette étiquette aux municipales de 1945 dans le troisième secteur (VIIIe, XVIe, XVIIe arrondissements). Il fait partie alors du cabinet du ministre communiste de la Santé publique, François Billoux, où il avait été nommé par un décret paru au Journal officiel du 21 novembre 1944. Aux législatives d’octobre 1945, il conduit sans succès, avec Edgar Faure, une liste d’Union des républicains et de la Résistance dans la deuxième circonscription de la Seine (Ier, IIe, VIIIe, IXe, XVIe et XVIIe arrondissements), qui recueille seulement 18 294 voix. Secrétaire général administratif du parti radical de 1946 à 1948, il se présente aux élections à la deuxième Constituante dans le Tarn mais est battu. Il subit un nouvel échec, dans le même département, le 10 novembre 1946. À cette date, il ne reçoit plus guère de clientèle à son cabinet, qui sera repris par son neveu, Jacques Lafay, futur élu Front National de Paris, mais il n’abandonne pas pour autant son intérêt pour les questions médicales, puisqu’il sera membre de l’Académie de médecine, membre du conseil national de l’ordre et président-fondateur de la Banque des yeux.
Sa carrière parlementaire commence en décembre 1946 au Conseil de la République, où il est élu par l’Assemblée Nationale. Il appartient alors à la commission de la famille, de la population et de la santé publique. Il est réélu en 1947 conseiller municipal de Paris et conseiller général de la Seine sous l’étiquette du RPF et les gaullistes le portent à la vice-présidence du Conseil municipal. Réélu sénateur RPF de la Seine le 7 novembre 1948, président de la commission de la famille de la Haute Assemblée, il démissionne du Conseil de la République en août 1951, puisqu’il a été élu député dans la deuxième circonscription de la Seine le 17 juin 1951, à la tête d’une liste RGR-radicale, concurrente à la liste RPF de Pasteur Valléry Radot. Sa liste obtient 19,2 % des suffrages exprimés et deux élus (Bernard Lafay et Pierre de Léotard, de la Réconciliation française). A l’Assemblée Nationale, il s’inscrit au groupe radical et il quitte le groupe RPF à l’Hôtel de Ville pour le groupe RGR, dont il devient le président. À l’Assemblée nationale, il est membre de la commission de la famille, de la population et de la santé publique et de la commission du travail et de la sécurité sociale.
Sa carrière ministérielle commence en 1952. Secrétaire d’État à la présidence du Conseil chargé de la fonction publique dans le cabinet Edgar Faure de janvier à mars 1952, il est de juillet 1953 à juin 1954 secrétaire d’État aux Affaires économiques dans le cabinet de Joseph Laniel, aux côtés d’Edgar Faure. Élu en 1954 à la présidence du Conseil municipal de Paris, il ne participe pas au cabinet Pierre Mendès France, mais il redevient membre du gouvernement comme ministre de la Santé publique et de la Population du deuxième gouvernement Edgar Faure du 23 janvier 1955 au 24 janvier 1956.
Bernard Lafay est exclu du parti radical au début de décembre 1955, en même temps que René Mayer, Jean-Paul David, Martinaud-Déplat… Il lui est reproché de ne pas avoir donné sa démission du gouvernement en même temps que les cinq autres ministres radicaux et d’avoir écrit une lettre à Pierre Mendès France dans laquelle il se déclarait solidaire d’Edgar Faure et où il ajoutait : « Les alliances que vous préconisez, les retournements que vous admettez, les critiques passionnées auxquelles vous cédez ne peuvent recueillir mon agrément ». Lors des élections législatives du 2 janvier 1956, consécutives à la dissolution, Bernard Lafay conduit dans la deuxième circonscription de Paris une liste d’Union du Rassemblement des gauches républicaines et indépendantes, sur laquelle figurent notamment Pierre de Léotard et Robert Bétolaud, ancien responsable du PRL, tandis que les radicaux mendésistes présentent une liste du « parti républicain radical et radical-socialiste et du parti républicain pour le redressement économique et social » conduite par Claude Panier. Réélu, Bernard Lafay devient vice-président du groupe parlementaire du RGR. Il appartient à la commission de la défense nationale et à la commission des pensions. Il vote la confiance à Guy Mollet le 31 janvier 1956.
Exclu du parti radical, Bernard Lafay crée alors une nouvelle formation, le Centre Républicain. De cette formation, Edith Cresson, qui y a travaillé comme jeune secrétaire, a laissé une description acide dans son livre Avec le soleil (Jean-Claude Lattès, 1976) : « J’assistai à la fabrication d’un parti bidon, qui s’appelait le Centre Républicain, regroupait des conservateurs résolus et se faisait financer par Marcel Dassault […]. Les bulletins d’adhésion au nouveau parti furent imprimés, mais il n’y avait pas d’adhérents. J’étais chargée de les remplir avec des noms relevés dans le dictionnaire des élus. On choisissait de petites communes dans les régions montagneuses et éloignées et on inscrivait les élus municipaux au hasard, sur les bulletins. Tous les vendredis, en fin de matinée, Marcel Dassault apparaissait, emmitouflé dans une écharpe de laine. Le Patron [Bernard Lafay] avait sur son bureau les bulletins, un peu froissés, pour leur donner l’apparence d’avoir été retournés par la poste. La progression rapide du Centre républicain dans les régions les plus déshéritées du monde rural ne sembla jamais étonner le grand industriel qui prenait un plaisir enfantin à en vérifier les progrès ». Bernard Lafay quitte à l’Hôtel de Ville le groupe du RGR pour fonder un groupe du Centre Républicain qu’il préside, et, le 26 septembre 1957, il quitte le groupe RGR de l’Assemblée nationale, siège comme non-inscrit, puis s’apparente le 13 janvier 1958 au groupe UDSR-RDA.
Dans ses éditoriaux de l’Heure de Paris, périodique créé avec le soutien financier de Marcel Dassault et de Marcel Bleustein-Blanchet, il demande en 1957-58 une réforme de la Constitution et de la loi électorale et souhaite le retour au pouvoir du général de Gaulle. Le 13 mai 1958, il vote contre la confiance à Pierre Pflimlin, refuse le 27 mai la proposition de résolution tendant à décider la révision de certains articles de la Constitution, mais accorde le 1er juin sa confiance au général de Gaulle et vote le 2 en faveur des pleins pouvoirs.
En septembre 1958, le Centre Républicain de Bernard Lafay fusionne, lors du congrès réuni à Paris, avec le Parti de la gauche démocratique et radicale-socialiste. Bernard Lafay devient alors le secrétaire général de la nouvelle organisation, présidée par André Morice. Il en restera secrétaire général jusqu’en octobre 1967 et présidera la fédération de la Seine. C’est sous cette étiquette qu’il se présente aux législatives de novembre 1958 dans la vingt-troisième circonscription de la Seine (partie du XVIIe arrondissement).
En dépit de sa notoriété, Bernard Lafay est alors battu par un jeune candidat gaulliste pratiquement inconnu, Guy Vaschetti, qui a dénoncé dans sa campagne électorale le long passé politique de Bernard Lafay et son passage au cabinet du ministre communiste François Billoux à la Libération. Le 30 novembre 1958, au deuxième tour, Guy Vaschetti obtient 45,9% des suffrages exprimés, devant Bernard Lafay (40,8%) et le candidat communiste Pierre Durand (13,2%). Après cet échec, Bernard Lafay est élu sénateur le 26 avril 1959 et il s’inscrit au groupe de la Gauche Démocratique. La même année, il est réélu conseiller municipal dans le cinquième secteur et préside le groupe du Centre Républicain à l’Hôtel de Ville.
À la fin des années 50, Bernard Lafay avait exprimé à plusieurs reprises son attachement à l’Algérie française. Dans une intervention à l’Assemblée nationale, le 2 juin 1956, il affirmait que « l’Algérie n’existe pas comme nation, elle est province de France » ; il demandait au gouvernement de Guy Mollet de prendre les mesures indispensables « à l’élimination des saboteurs, des défaitistes, des traîtres » et d’exiger des gouvernements tunisien et marocain un droit de suite contre les rebelles. Il était alors, avec notamment Jacques Soustelle et Maurice Viollette, membre du comité directeur de l’Union pour le salut et le renouveau de l’Algérie française et avait assuré de sa sympathie le Front national des combattants, créé en 1957 par Jean-Marie Le Pen. Resté fidèle à cette attitude aux débuts de la Ve République, il est hostile à la politique menée par le général de Gaulle. Le 27 janvier 1960, au moment des barricades d’Alger, il proclame sa solidarité avec ceux qui luttent en Algérie pour rester français. Le 20 juin 1960, il participe au colloque de Vincennes. Il est signataire en octobre 1960, en tant que membre de l’Académie de médecine, du Manifeste des intellectuels français, réponse au manifeste des 121. Il rejoint le Front national pour l’Algérie française lancé le 7 juillet 1960 par Jean-Marie Le Pen et participe, le 16 novembre 1961, au grand meeting rassemblant les leaders de l’Algérie française organisé à l’appel du Comité de Vincennes : il soutient l’ancien commissaire de police Jean Dides, élu conseiller municipal de Paris en 1959 et rallié au Centre républicain, inculpé de provocation au meurtre et écroué à la Santé après avoir proclamé « Gloire au général Salan » devant une assemblée scandant « OAS ! OAS ! » lors d’un meeting du Comité de Vincennes. L’adhésion de Bernard Lafay au F.N.A.F. provoque des remous au sein du Centre républicain. Plusieurs dirigeants, dont Joseph Lanet, estiment que son appartenance à un organisme dont faisaient partie également Jean-Marie Le Pen, Jacques Isorni et Jean-Louis Tixier-Vignancour pouvait créer une situation « équivoque et insupportable » qu’il convenait d’éclaircir. En 1962, après les accords d’Evian, Lafay dénonce la carence du gouvernement sur le sort des militaires français prisonniers du FLN : il écrit un article dans ce sens dans Le Monde du 24 avril 1962. En septembre 1964, au congrès de la Fédération de la Seine du Centre républicain, une motion est votée réclamant une loi d’amnistie pour les personnes condamnées à la suite des événements qui se sont déroulés en Algérie. À cette même occasion, Bernard Lafay refuse tout compromis avec l’UNR, qualifiée d’« organisme parasitaire », d’« épiphénomène sans consistance, bulle de savon sans contenu propre ni couleur discernable ».
L’hostilité au président de Gaulle conduit également Bernard Lafay à accepter en septembre 1964 d’appartenir au comité directeur du « Rassemblement démocratique », regroupement du centre-gauche associant principalement le Parti républicain radical et radical-socialiste, l’Union démocratique et socialiste de la Résistance et le Centre Républicain, sous la présidence de Maurice Faure. Aux élections municipales de 1965, à la tête d’une liste centriste « Libertés de Paris », il bat dans le onzième secteur (XVIIe arrondissement) la liste pour le Renouveau de Paris conduite par le député UNR Jean de Préaumont. L’intitulé de sa liste rappelle le combat qu’il mène alors afin que la capitale bénéficie d’un statut de commune normale s’administrant librement sous la direction d’un maire élu. En novembre 1965, il est membre du conseil politique du secrétariat pour la région parisienne de l’association pour la candidature démocrate de Jean Lecanuet.
Progressivement pourtant, Bernard Lafay se rapproche de la majorité. Candidat du Centre Démocrate aux législatives de 1967 dans la vingt-deuxième circonscription (partie du XVIIe arrondissement), il est élu contre le gaulliste Jacques Sanglier, au deuxième tour, avec 51% des suffrages exprimés. À l’Assemblée Nationale, il s’inscrit au groupe « Progrès et Démocratie moderne » de Jacques Duhamel. Mais il est l’un des rares députés du groupe à ne voter aucune mention de censure entre 1967 et 1968 ; Pierre Abelin, secrétaire général du Centre démocrate, estime même que Bernard Lafay, « votant régulièrement avec la majorité », n’a plus sa place au sein du groupe P.D.M. En juin 1968, Lafay se représente aux législatives avec l’appui de l’UDR et prend comme suppléant Jacques Sanglier, son ancien adversaire de 1967. Les deux hommes l’emportent dès le premier tour, avec 52,7% des suffrages exprimés, devançant le nouveau candidat P.D.M., Guy Labat. Après sa réélection, Bernard Lafay s’apparente au groupe UDR à l’Assemblée Nationale. Le 28 mars 1969, il crée au Conseil de Paris un nouveau groupe, l’Union du Centre, proche de l’UDR, qui appelle à voter « oui » au référendum du 27 avril 1969. Après l’élection de Georges Pompidou à la présidence de la République, il devient secrétaire d’État auprès du ministre du développement industriel et scientifique dans le gouvernement de Jacques Chaban-Delmas, poste qu’il conserve jusqu’en 1972. Mais la composition de son cabinet atteste encore de son passé antigaulliste : son chef du cabinet est en effet Serge Jeanneret, ancien militant d’Action française, ancien chef adjoint de cabinet d’Abel Bonnard, ministre de l’éducation nationale dans le cabinet de Pierre Laval, et proche de Jean Louis Tixier-Vignancour lors des présidentielles de 1965.
En 1971, Bernard Lafay conduit aux élections municipales, dans le XVIIe arrondissement, une liste de la majorité groupant à la fois gaullistes et centristes, qui est facilement élue au second tour. Réélu député du XVIIe arrondissement aux élections de 1973, au deuxième tour, sous l’étiquette de l’U.R.P. avec 62,3% des suffrages exprimés contre Guy Labat qui se présente avec l’étiquette « Mouvement réformateur », il soutient Jacques Chaban-Delmas à la présidentielle de 1974 et, en 1975, est membre du Comité d’études pour un nouveau contrat social présidé par son ami Edgar Faure.
En 1975, il retrouve le poste de président du Conseil de Paris et il y est réélu en juin 1976. En décembre 1976, il participe à la fondation du RPR. Il proteste alors contre la candidature de Michel d’Ornano à l’Hôtel de Ville, envoyant une lettre dans ce sens au président Valéry Giscard d’Estaing le 12 janvier 1977. Il ne répond pas aux propositions qui lui sont faites, soit pour composer une liste d’union, soit pour se retirer du XVIIe arrondissement, en échange d’un poste ministériel, d’un poste au Conseil Constitutionnel ou de la présidence de la Croix-Rouge. Avant l’annonce de la candidature de Jacques Chirac, il fait figure d’un possible candidat gaulliste au poste de maire de Paris. Le 13 février 1977, en pleine campagne électorale, il meurt subitement, victime d’un malaise cardiaque. Ses obsèques sont célébrées à Notre-Dame de Paris.
Dans le XVIIe arrondissement, qu’il a représenté à l’Hôtel de Ville municipal pendant trente-deux ans, Bernard Lafay s’est taillé un véritable fief politique, en envoyant ses vœux à tous ses électeurs, en intervenant pour trouver du travail à ses habitants, en œuvrant pour le centre d’aides sociales de la rue Bayer, en ouvrant à tous sa permanence de la rue d’Armaillé. Il a été de 1945 à 1977 l’une des personnalités essentielles de la vie politique parisienne, mais son gaullisme a été intermittent.
Commandeur de la Légion d’honneur, Bernard Lafay était décoré également de la rosette de la Résistance (décoration du 24 mai 1946, parution dans le Journal officiel du 17 mai) et de la croix de guerre 1939-1945. Il a eu deux enfants, Françoise (née en 1933) et Philippe (né en 1936), qui lui succède au Conseil de Paris.
Ph. Nivet
M
MANCHE (gaullistes et gaullisme dans la)
Depuis que la France a adopté le suffrage universel, la Manche figure parmi les départements les plus orientés à droite. Que l’on considère les élections de 1849, 1877, 1885, 1919 ou 1936, c’est-à-dire des élections de combat, la Manche donne toujours une confortable majorité aux candidats des diverses familles dites de droite. Département violemment modéré, où règnent tranquillement des notables à la fois représentants ou agents traditionnels d’un conservatisme savamment géré, la Manche, par ailleurs rurale et catholique, est très tôt gaulliste. Dès juin 1940, plusieurs dizaines de jeunes Manchois traversent la mer de la Manche pour rejoindre le général de Gaulle à Londres et s’engager dans les FFL. Le 24 novembre 1940, les portes et les murs de la salle des fêtes de Cherbourg sont recouverts de papillons sur lesquels on peut lire : « À bas Laval ! », « Pétain est gaga », « Vive de Gaulle ! ». Le 11 mai 1941, le jour de la fête de Jeanne d’Arc, à l’appel du général de Gaulle, plusieurs milliers de Manchois passent devant leur monument aux morts en criant : « Vive l’Angleterre ! », « Vive de Gaulle ! ». Quant à la bataille des V, déclenchée au début du printemps 1941, elle prend aussitôt de l’ampleur dans l’ensemble du département et devient politique, surtout lorsque les V sont garnis d’une croix de Lorraine ; ce qui est très souvent le cas. Dans un rapport daté du 18 février 1941, c’est-à-dire précédant la campagne des V, les Renseignements généraux de la Manche notent : « Dans les principales villes du département et sur les côtes en particulier les gens parlent de l’ex-général de Gaulle et disent du bien de lui ; ils paraissent même l’aimer. Beaucoup d’entre eux écoutent la radio anglaise qui le cite souvent dans ses émissions du soir. Dans les campagnes, son nom est connu et sa photographie aussi. Des enfants en parlent à l’école répétant ce que disent leurs mères à la sortie de la messe ou leurs pères dans les cafés. Son nom recouvre de plus en plus souvent les affiches officielles. Hier soir, à Saint-Lô, deux hommes à bicyclette ont descendu à toute allure la rue Havin en criant : « Vive de Gaulle ! ». De l’été 1940 à l’été 1944, les rapports du préfet de la Manche signalent « l’influence grandissante de l’ex-général de Gaulle », « les arrestations pour propagande gaulliste », « le développement des activités d’une résistance en majorité gaulliste ». Rien d’étonnant donc à ce que le général de Gaulle reconnaisse dans ses Mémoires de guerre avoir été « saisi par une grande vague d’enthousiasme et d’émotion populaire » quand il est entré dans Cherbourg le 20 août 1944. Son voyage, effectué le 10 juin 1945 à travers les ruines de Saint-Lô, Coutances, Villedieu, Mortain… et qualifié de « triomphal » par la presse locale, confirme son extraordinaire popularité auprès des Manchois. Celle-ci n’est d’ailleurs pas éphémère. En effet, de 1945 à 1969, la Manche figure toujours parmi les départements métropolitains les plus gaulliens de France, quand il n’est pas le plus gaullien.
Ce département de 435 000 habitants en 1946, divisé en 48 cantons et 648 communes, répond massivement oui-oui aux deux questions posées par le général de Gaulle lors du référendum du 21 octobre 1945, et élit le même jour quatre députés MRP dont la liste obtient près de la moitié des suffrages exprimés alors que ses candidats déclarent « marcher derrière de Gaulle ». En 1946, ses électeurs rejettent à une très large majorité les deux projets de nouvelle constitution et accordent un peu plus de la moitié de leurs suffrages aux quatre députés du MRP, l’Union gaulliste tardant à se mettre en place. Au début de novembre 1946, alors que ce mouvement compte près de 1 500 adhérents dans la Manche, son secrétaire départemental, Henri Ringenbach, fait savoir, dans un communiqué de presse publié le 5 novembre 1946, que ses responsables n’ont pas jugé utile de constituer une liste de candidats aux élections législatives.
Avec la création du RPF en avril 1947, le gaullisme partisan s’organise et s’implante dans la Manche. Un comité départemental provisoire est formé dès le 20 avril à Carentan lors d’une réunion présidée par Jean Rouaze, nommé délégué du RPF pour la Manche, et à laquelle participent plusieurs responsables de l’Union gaulliste. En raison du grand nombre de demandes d’adhésion qu’il reçoit dans les jours suivants, le comité provisoire décide l’ouverture de permanences à Cherbourg, Valognes, Saint-Lô, Coutances, Granville. À l’automne 1947, le groupement RPF de la Manche, dirigé par Jean Cau, qui a remplacé Jean-Baptiste Rouaze au début de septembre, est divisé en onze circonscriptions ayant chacune un bureau chargé des liaisons avec les sections cantonales et communales. Par exemple, le bureau de la circonscription de Granville comprend une vingtaine de membres : un président d’honneur (M. Maris, maire de Granville), un président (M. Villette, président de la chambre de commerce), deux vice-présidents, un secrétaire, un trésorier et quatorze délégués (trois délégués à la propagande, deux délégués à l’action sociale, un délégué à l’information politique, un délégué à l’information touristique, un délégué aux jeunes, un délégué aux fonctionnaires, un délégué aux ouvriers, un délégué aux commerçants, un délégué aux professions libérales, un délégué aux professions agricoles). Tous les bureaux de circonscription ne sont pas encore en place pour les élections municipales d’octobre 1947 qui sont un succès pour le RPF. Majoritaire à Cherbourg, la principale ville du département, il l’emporte également à Granville, Valognes et Carentan. En obtenant 36,7% des sièges municipaux à pourvoir dans la Manche, il devance nettement les indépendants (31,1%), le MRP (21,4%). Sa percée s’est faite principalement au détriment des indépendants dont la proportion de conseillers municipaux passe de 64,5% en 1945 à 31,1% en 1947. Celle du MRP régresse moins sensiblement : 21,4% en 1947 au lieu de 25,5% en 1945. Celle de la gauche reste stable à 6%. Sur les 648 maires élus en octobre 1947, 241 appartiennent au RPF, soit 37,2%. La proportion des maires gaullistes varie selon la taille des communes. Elle est plus élevée dans les communes de plus de 1 000 habitants (45,5%) et dans les communes de moins de 500 habitants (40,5 %) que dans les communes de 500 à 1 000 habitants (26%).
Fort de ce premier succès électoral, le RPF développe son implantation dans l’ensemble de la Manche, non sans précautions, des commissions locales de criblage, des demandes d’adhésion doublant la commission départementale spécialement créée pour cette tâche et se montrant particulièrement intransigeantes en ce qui concerne l’attitude des postulants sous l’Occupation. Le nombre de ses adhérents passe malgré cela de 3 500 au 20 juin 1947 à 9877 au 22 août 1948. À cette date, 76,2% d’entre eux sont des hommes, 47% des agriculteurs, 18,4% des artisans et commerçants, 10,7% des employés, 4,4% des ouvriers agricoles. Leur âge moyen est de quarante-deux ans. Le comité départemental, élu le 25 avril 1948 à Coutances lors du premier congrès départemental réunissant deux cents délégués des sections cantonales, compte une vingtaine de membres parmi lesquels ne figurent que deux notables : Maurice Langevin (conseiller général de Saint-Sauveur-Lendelin) et Louis Vennat (conseiller général de Juvigny-le-Tertre). Le bureau départemental, désigné par Jean Cau, lui-même nommé délégué départemental par la direction nationale, est présidé par Félix Loir et se compose en outre de deux vice-présidents, un trésorier, un trésorier-adjoint, un secrétaire et quatre délégués dont deux à la politique, un à la propagande et un aux adhésions. Le parti gaulliste paraît alors promis à un bel avenir dans la Manche lorsque surviennent les premières dissensions dans ses rangs à propos de la composition de la liste des candidats aux élections au Conseil de la République. Le 22 août 1948, le comité départemental propose de présenter une liste du RPF conduite par Henri Cornat, président du conseil général et sympathisant du RPF, avec Roger Maris, maire de Granville, et Joseph Lecacheux, député ; ces deux derniers étant membres du RPF. La liste désignée par la direction nationale est assez différente, les républicains indépendants Léon Jozeau-Marigné et Michel Yver accompagnant Joseph Lecacheux. Des protestations émanent aussitôt des sections, certaines d’entre elles en profitant pour dénoncer le caractère « anti-démocratique », non seulement de la procédure d’investiture des candidats au Conseil de la République mais aussi du mode de désignation du délégué départemental accusé par ailleurs de s’entourer de « délégués douteux ». L’élection des trois candidats du RPF dès le premier tour de scrutin ne met pas fin aux luttes intestines. Des démissions succèdent aux exclusions alors que les dirigeants du RPF manchois s’efforcent de renforcer sa base professionnelle et sociale en constituant des groupements de cadres, employés et ouvriers notamment à l’arsenal de Cherbourg, l’usine laitière Gloria de Carentan, la Trésorerie générale de la Manche à Granville, la SNCF, l’EDF, l’éducation nationale. L’élection d’un nouveau comité départemental de cinquante-quatre membres en décembre 1948 permet d’améliorer un peu la représentativité géographique de cette instance jusqu’alors dominée par des délégués cherbourgeois ; mais la question d’une alliance avec les indépendants reste posée et continue de déchirer les militants gaullistes qui regrettent de ne pas pouvoir disposer d’un journal pour s’exprimer ; « Manche Eclair », l’hebdomadaire de Joseph Lechacheux, n’accordant qu’une page aux activités du RPF dans la Manche et n’offrant aucune place aux débats d’idées et de stratégies. La querelle rebondit à l’occasion de la campagne pour les élections cantonales de mars 1949 au cours de laquelle Léon Jozeau-Marigné apporte son soutien dans le canton de Villedieu à René Quintin, candidat indépendant, opposé à Eugène Nivard, candidat du RPF investi par les instances locales et nationales. La défaite de ce dernier ne doit pas pour autant masquer le succès du RPF dont les candidats au conseil général de la Manche obtiennent 42,5% des suffrages exprimés au premier tour et enlèvent au total la moitié des vingt-quatre sièges renouvelables. Le conseil départemental, qui s’est réuni à Coutances le 15 mai 1949 et qui a porté à 75 le nombre de ses membres (54 représentants des sections cantonales et 21 représentants des groupements professionnels), a d’ailleurs décidé la création d’un groupe RPF au sein du conseil général et d’une amicale départementale des maires et conseillers municipaux ; mais les élus gaullistes renoncent à leur mise en place sous la pression de leurs collègues indépendants et du fait de l’affaiblissement de leur militantisme. Certes la visite du général de Gaulle à Granville le 30 juillet 1949 mobilise plus de 15 000 personnes « enthousiastes », et les réunions publiques du RPF attirent encore de nombreux auditeurs ; mais l’élan de la première année semble brisé. Le nombre des adhérents tombe à 5000 le 24 juin 1950 et les élus prennent de plus en plus leurs distances vis-à-vis des organisations du parti qui attendent les élections législatives pour relancer leurs activités. Entre temps, les trois conseillers de la République tombent facilement d’accord pour proposer une liste d’union entre le RPF et les républicains indépendants. À deux reprises, Léon Jozeau-Marigné rencontre le général de Gaulle pour tenter de le convaincre de l’intérêt de cette stratégie unioniste. Le refus du président du RPF amène Pierre Hénault à rompre avec son parti le 15 mai 1951 pour accepter une place sur la liste des républicains indépendants. Mais, deux jours plus tard, le député RPF sortant donne son accord pour figurer en deuxième position sur la liste RPF derrière Claude Hettier de Boislambert. Bien que désemparés par les tractations d’état-major, 6000 militants et sympathisants accueillent chaleureusement le général de Gaulle venu à Coutances pour apporter son soutien à la liste du RPF qui refuse finalement toute alliance et tout apparentement. Arrivée largement en tête avec 30,7% des suffrages exprimés, celle-ci obtient deux sièges qu’elle prend au MRP dont la liste rétrograde à la deuxième place avec 21,5% des suffrages exprimés et deux sièges. Quant à la liste des indépendants, elle est devancée par celle de la SFIO, l’une et l’autre n’obtenant qu’un siège avec respectivement 19,4% et 19,9% des suffrages exprimés.
Au lendemain de ces élections législatives, les adhérents gaullistes, doutant de l’avenir de leur parti qui ne peut pas gouverner seul et qui n’entend pas s’allier avec d’autres, le quittent en grand nombre tout comme les élus. Aux élections cantonales d’octobre 1951, les candidats gaullistes ne sont plus que neuf pour vingt-quatre sièges à pourvoir. Huit d’entre eux sont élus ; mais ils ne représentent plus globalement que 23,2% des suffrages exprimés. En 1952, le malaise s’accroît dans les rangs du RPF de la Manche à la suite des votes de Pierre Hénault en faveur du gouvernement d’Antoine Pinay, de l’absence sur le terrain de Claude Hettier de Boislambert auquel il est reproché de consacrer une partie de son temps aux « chasses équatoriales », de l’inaction du comité départemental. En avril 1952, un seul adhérent a réglé sa cotisation à la section de Cherbourg qui comptait plus d’un millier d’adhérents en avril 1948. Les élections municipales d’avril 1953 traduisent la quasi-disparition du RPF de la vie politique manchoise. Il n’obtient plus que 2,9% des sièges de conseillers municipaux et quatorze maires seulement se déclarent RPF, dont ceux de Cherbourg et Granville. La fédération de la Manche des républicains sociaux, qui prend le relais du groupement du RPF, n’existe quasiment pas. Elle ne présente aucun candidat aux élections cantonales de 1955 et 1958. Elle ne se manifeste que pendant la campagne pour les élections législatives de 1956 ; elle remplit alors le rôle d’un comité d’investiture pour Claude Hettier de Boislambert et ses amis qui recueillent 6% des suffrages exprimés.
Avec le retour au pouvoir du général de Gaulle en juin 1958, le gaullisme enregistre d’indéniables succès dans la Manche. Le 28 septembre 1958, 93,2% des Manchois s’exprimant lors du référendum répondent oui. C’est le record national. Le 21 décembre 1958, 95,8% des grands électeurs présidentiels de la Manche votent pour Charles de Gaulle. Nouveau record national. Jusqu’à son départ en 1969, le général de Gaulle conserve la confiance d’une large majorité des Manchois qui lui réservent un accueil tout à fait exceptionnel lors de son voyage présidentiel des 6 et 7 juillet 1960 et qui n’élisent que des députés gaullistes entre 1962 et 1968.
M. Boivin
